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Des enfants aborigènes auraient été utilisés comme cobayesDARWIN, 16 avril (Flash d'Océanie) – Une Commission sénatoriale censée enquêter sur la pertinence d'éventuels dédommagements aux membres de la "génération volée" des aborigènes australiens a entendu mardi un témoignage selon lequel certains des enfants, placés d'office dans des familles blanches ou dans des centres spécialisés, voire dans des missions religieuses, dans le cadre d'un processus d'intégration forcée dans la seconde moitié du vingtième siècle, auraient été utilisés à des fins d'expérimentations dans le cadre de recherches sur un vaccin contre la lèpre.
Le témoignage en question est venu de Mme Kath Mills, elle-même membre de cette "génération volée".
Elle a expliqué le fait que ces accusations ne font surface que maintenant par la "honte" que ressentaient jusqu'ici les Aborigènes.
"Mon père a travaillé comme ordonnance médicale et il m'a donné le nom de ce médicament, je ne veux pas en parler mais ça a rendu nos gens très malades, il m'a dit qu'ils avaient failli mourir de ce traitement", a-t-elle déclaré mardi à la radio nationale ABC.
Cette commission, qui siège actuellement dans la ville australienne de Darwin (Nord du pays), mène actuellement enquête sur les préjudices subis par cette génération d'Australiens aborigènes, après que le Premier ministre travailliste Kevin Rudd ait officiellement et pour la première fois présenté ses excuses au peuple premier d'Australie, le 13 février 2008.
Fin mars, M. Rudd a également pris l'engagement de venir à bout d'une statistique particulièrement dérangeante: une différence de 17 ans dans la moyenne d'espérance de vie entre les Australiens aborigènes et la moyenne nationale, tous groupes confondus.
Le chef de l'exécutif australien a affirmé sa volonté de supprimer cette différence en défaveur des Aborigènes "d'ici 2030" pour parvenir à une véritable égalité devant les soins.
Contritions fédérales
Lors de ses excuses prononcées le 13 février devant le Parlement australien dans la capitale fédérale Canberra, M. Rudd a fait référence aux "mauvais traitements infligés aux générations volées, ce chapitre terne de l'histoire de notre nation".
"Le moment est venu pour la nation de tourner une nouvelle page de l'histoire de l'Australie en corrigeant les fautes du passé (…) Nous demandons pardon pour les lois et les politiques des Parlements et gouvernements successifs qui ont infligé de profonds chagrins, souffrances et pertes à ceux de nos compatriotes australiens. Nous demandons tout particulièrement pardon pour avoir retiré des enfants aborigènes et insulaires du Détroit de Torrès (extrême Nord de l'île-continent) à leurs familles, leurs communautés et leur pays. Pour la souffrance de ces générations volées, de leurs descendants et les familles qu'ils ont laissées, nous demandons pardon. Aux mères et aux pères, aux frères et sœurs, pour avoir brisé des familles et des communautés, nous demandons pardon. Et pour l'indignité et la dégradation ainsi infligées à un peuple et à une culture fiers, nous demandons pardon", a alors déclaré M. Rudd.
"Nous, le Parlement d'Australie, demandons respectueusement que ces excuses soient reçues dans l'esprit où elles sont offertes, dans le cadre de la guérison de cette nation", a-t-il ajouté, évoquant
Après les excuses, les actes
M. Rudd évoquait aussi alors "un avenir où les injustices du passé ne doivent jamais, jamais, se reproduire" et "dans lequel nous mettons en œuvre la détermination de tous les Australiens, indigènes et non-indigènes, pour combler le fossé qui existe entre nous en matière d'espérance de vie, de réussite scolaire et d'opportunités économiques (…) Un avenir basé sur le respect mutuel, sur la détermination mutuelle et sur la responsabilité mutuelle. Un avenir où tous les Australiens, quelle que soit leur origine, sont des partenaires à égalité, avec des opportunités égales et une part égale pour façonner le chapitre suivant de l'histoire de ce grand pays, l'Australie".
M. Rudd avait aussi proposé, à l'issue de son discours, la création d'une commission paritaire qui chargée de réfléchir aux moyens de combler les disparités entre les communautés aborigènes et le reste de la population australienne.
Ce discours, qui prenait la forme d'une motion (restant à adopter par le Parlement australien), intervenait au lendemain de l'ouverture de la session inaugurale du nouveau (et 42ème) Parlement issu des législatives de novembre 2007, qui ont vu la victoire du parti travailliste de M. Rudd.
460.000 Aborigènes pour 21 millions d'habitants
La population aborigène d'Australie compte environ 460.000 personnes pour une population totale de ce pays estimée actuellement à un peu plus de 21 millions d'habitants.
L'arrivée en Australie des premiers colons européens remonte à 1788.
Au plan historique, l'Australie n'a reconnu que tardivement l'existence officielle du peuple aborigène : il a fallu attendre 1992 pour qu’un verdict rendu par la Haute Cour renverse l'ancienne notion de "terra nullis" qui ignorait l'existence d'un peuplement aborigène avant l'arrivée des premiers Européens.
Cette affaire, connue sous le nom de "Mabo" (du nom de l'Aborigène, Eddie Mabo, qui l'avait porté en justice) avait, à l'époque, marqué un tournant dans le combat des Aborigènes pour leur reconnaissance et ouvert la voie à l'élaboration de lois portant sur la gestion foncière des terres reconnues comme étant indigènes.
Depuis 1998, l’Australie observe chaque année, fin mai, la « Journée Nationale des Excuses» (National Sorry Day), censé commémorer et rendre hommage aux enfants aborigènes (ou métis aborigènes) qui, entre le début du 19ème siècle et les années 1970, ont été confisqués à leurs familles biologiques.
Ce « Sorry Day » annuel a été institué à la suite des recommandations d’une commission d’enquête, en 1997.
La Tasmanie, État précurseur
En octobre 2007, pour la première fois en Australie, le Parlement de État de Tasmanie (île du Sud du continent) avait débattu d'un projet de loi visant à consacrer une enveloppe de quelque cinq millions de dollars australiens (trois millions d'euros) au dédommagement des personnes ayant été victimes de ce régime d'intégration.
Paul Lennon, Premier ministre de cet État australien, avait alors estimé que cette somme, à laquelle une centaine de familles pourraient avoir droit, "ne peut certes pas redresser les torts causés. Mais elle peut peut-être aider ces membres de la génération volée à savoir que la génération actuelle reconnaît les torts fondamentaux et terribles qui ont été faits".
Ce projet de loi, qui est en passe de se réaliser dans cet État du Sud de l'Australie, prévoit un processus de compensation aux victimes ou ayant droit en ayant fait la demande, jusqu'à 20.000 dollars australiens (12.000 euros) par famille.
Il y a neuf ans, le Parlement de Tasmanie était aussi le premier à officiellement présenter des excuses à la communauté aborigène pour cette politique d'intégration forcée.
Source:
http://newspad-pacific.info