Article interessant dans Le Monde (edition du 30/10/2007) :
Polémique autour d'un projet d'usine de papier en Australie
LE MONDE | 30.10.07 | 16h15 • Mis à jour le 30.10.07 | 16h15
SYDNEY (AUSTRALIE) CORRESPONDANCE
La construction de la plus grosse usine de pâte à papier d'Australie, dans le nord de la Tasmanie, va pouvoir débuter, après le feu vert donné, début octobre, par le ministère fédéral de l'environnement. C'est une victoire pour Gunns Ltd, l'un des plus gros exploitants forestiers de l'hémisphère Sud, à l'origine du projet, et pour le gouvernement travailliste de l'Etat de Tasmanie.
Le projet a relancé le débat sur l'exploitation des forêts tasmaniennes. Et la polémique, qui mobilise écologistes et personnalités de tous bords, a pris une dimension nationale. Le ministre de l'environnement, Malcolm Turnbull, risque même d'en faire les frais dans sa région de Sydney, à l'occasion des élections fédérales prévues le 24 novembre.
En Tasmanie, île de 476 000 habitants située au sud de l'Australie, la déforestation est un enjeu majeur. Selon l'organisation écologiste WWF, l'équivalent de 44 terrains de football serait rasé chaque jour par des bombes au napalm, pour être ensuite replantés en espèces exotiques.
La future usine de pâte à papier consommera 4 millions de tonnes de bois par an. La compagnie Gunns achètera notamment chaque année à Forestry Tasmania, le département responsable des forêts de Tasmanie, un million et demi de tonnes de bois, soit la moitié des ressources disponibles dans les forêts de l'Etat.
Les craintes des opposants au projet ne s'arrêtent pas à la déforestation. La vallée de la Tamar, où l'usine doit être construite, est une zone viticole importante, visitée par 150 000 touristes chaque année. "Nos trois principales peurs sont l'odeur, les émissions de dichlorophénol pouvant affecter le vin et le passage continu des camions à proximité de la route des vignobles", explique Allison Williams, de Wine Industry Tasmania, l'association des viticulteurs tasmaniens.
UN ACCORD À 48 CONDITIONS
Les pêcheurs de la région sont également inquiets. L'usine doit en effet reverser 64 000 tonnes d'effluent par jour dans le détroit de Bass. "On ne pourra plus se permettre de pêcher dans cette zone, on ne peut prendre aucun risque pour le consommateur en cas de pollution", commente John Hammond, représentant des pêcheurs de coquilles Saint-Jacques de Tasmanie.
A terme, c'est l'image de marque "nature" de la Tasmanie qui pourrait pâtir du projet. Sur son site Web, Gunns affirme pourtant que la future usine sera "la plus propre du monde". Un système de blanchiment sans chlore sera mis en place, ainsi qu'un traitement de l'effluent à deux niveaux. Et le gouvernement fédéral a soumis son accord à 48 conditions.
La construction de l'usine coûtera 1,1 milliard d'euros, mais à terme, selon le gouvernement tasmanien, son implantation devrait rapporter 4,3 milliards d'euros de retombées à l'Etat le plus pauvre d'Australie.
Marie-Morgane Le Moël
Article paru dans l'Ă©dition du 31.10.07.
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0 ... 771,0.html