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Secouristes en "burqini" sur la plage australienne de Cronulla
LE MONDE | 17.03.07 | 14h12 • Mis à jour le 17.03.07 | 14h12
Cronulla, au sud de Sydney, est une petite ville tranquille, en général. Mais ses habitants assistent à un changement qui ne va pas sans heurts. Depuis quelques semaines, la grande plage est patrouillée par une vingtaine de sauveteurs bénévoles musulmans. C'est la première fois, depuis sa création il y a cent ans, que la populaire organisation de nageurs-sauveteurs Surf Life Saving Australia (SLSA) accueille des musulmans en son sein.
Ce n'est pas un hasard si Cronulla a été choisie pour recevoir les recrues : en décembre 2005, elle avait été le théâtre d'émeutes racistes. Accusant des Libanais d'avoir agressé deux secouristes, des Blancs s'étaient livrés, durant plusieurs jours, à une chasse aux personnes d'allure méditerranéenne sur la plage et dans les rues.
L'événement, au lieu de bannir les musulmans de Cronulla, aura eu l'effet inverse. Début 2006, la campagne "Surfons sur la même vague" a été lancée par le gouvernement et l'organisation de sauveteurs. Celle-ci compte plus de 110 000 professionnels et bénévoles à travers le pays, mais seulement 5 % sont issus de familles non anglophones. "Le sauveteur est un symbole australien. Or nous sommes quasiment exclusivement des Anglo-Saxons. Il fallait s'ouvrir à la diversité ethnique du pays", explique Lee Howell, de la SLSA. A l'issue de trois mois d'entraînement, 18 jeunes d'origine libanaise, syrienne ou pakistanaise ont obtenu le médaillon de bronze des secouristes.
Pour les trois femmes ainsi diplômées, une styliste a conçu un "burqini", un maillot en polyester couvrant le corps de la tête aux pieds, adapté pour leur permettre de nager rapidement. "Je voulais prouver que tout en en étant musulmane, je pouvais jouer un rôle important dans cette société", commente Mecca Laalaa, l'une des nouvelles secouristes.
INSULTES ET TRACTS RACISTES
Le programme est mis en place alors que la communauté musulmane australienne vit une période difficile. Avec une centaine de pays et ethnies d'origine pour 300 000 personnes, c'est une population hétérogène, en proie à des conflits internes, en particulier sur la place à accorder aux radicaux, et qui connaît de nombreux problèmes sociaux. A cela s'est ajouté le poids de la suspicion après les attentats du 11-Septembre et de Bali. "On a nettement vu un changement d'attitude à notre égard de la part de gens qui pourtant nous avaient toujours connus", observe Mme Laalaa.
L'arrivée sur la plage des musulmans secouristes s'est accompagnée d'insultes, et des tracts racistes ont été distribués. John Moffat, candidat pour les élections locales du parti d'extrême droite Australia First, a demandé la fin de ce "cauchemar multiculturel". Leur présence semble toutefois, quelques semaines plus tard, mieux acceptée.