mais je suis toujours aussi sceptique... et d'ici 2100, les coraux ont le temps de disparaître
Réchauffement climatique, un espoir pour les récifs coralliens Citer | Répondre
--------------------------------------------------------------------------------
Un article qui fera du bien à tous les amoureux de la plongée et du snorkeling sous les tropiques.
Et si certains récifs coralliens tiraient profit du réchauffement climatique...
LE MONDE | 18.12.04 | 13h17
Le réchauffement climatique fait-il peser une menace supplémentaire sur les récifs coralliens, déjà durement touchés par les activités humaines, pollution et pêche à l'explosif notamment ? C'est ce que concluait une déclaration, dite d'Okinawa, sur la conservation et la restauration à l'échelle mondiale des récifs coralliens en péril, rendue publique en juillet, à l'issue du Congrès international tenu sur ce thème. Selon les experts réunis à cette occasion, "l'augmentation de la température de surface des océans, la diminution des niveaux de carbonate ainsi que l'élévation du niveau des mers causés par la hausse du CO2 d'origine humaine dans l'atmosphère concourent en synergie à stresser les récifs coralliens, ce qui conduit à un sévère blanchiment et à une large mortalité du corail".
Mais une nouvelle étude, publiée dans le dernier numéro de la revue Geophysical Research Letters,prend à rebours ces conclusions. Ben McNeil, de l'école de mathématiques de l'université de Nouvelle-Galles du Sud, à Sydney, et ses collègues estiment que le réchauffement des eaux de surface pourrait se traduire, en 2100, par un taux de calcification des coraux 35 % plus élevé qu'avant la période préindustrielle. Les prévisions précédemment avancées tablaient sur une décroissance de la calcification des récifs de 20 % à 60 % en 2100.
Pour saisir ces divergences d'appréciation, un petit rappel sur la formation des récifs coralliens s'impose : ils sont le fruit du patient travail de petits polypes, semblables à de minuscules méduses, qui édifient un squelette calcaire dans lequel ils s'abritent. Ils vivent en symbiose avec des micro-algues unicellulaires, les zooxanthelles. Celles-ci bénéficient de certains composés organiques produits par le polype et fournissent, en échange, un apport supplémentaire d'oxygène à travers la photosynthèse. Les zooxanthelles protègent également la calcification, en dégradant certains acides produits par les polypes. Mais il suffit d'un stress causé, par exemple, par une élévation sensible de la température de l'eau, pour que les zooxanthelles soient expulsées et que s'engage le processus - parfois réversible - de blanchiment du corail.
La calcification dépend à la fois de la concentration d'aragonite (CaCO3, ou carbonate de calcium) dans l'eau de mer et de la température de celle-ci. Différents effets antagonistes ont été mis en évidence, rappelle Loïc Charpy (Institut de recherche en développement, Marseille) : "Une augmentation du CO2 entraîne une diminution de la saturation en aragonite et, donc, une diminution de la calcification (précipitation de l'aragonite), donc destruction des récifs fragilisés,indique le chercheur. Par contre, d'autres expérimentations ont montré que, quand la température augmente, on observe une hausse de la calcification."
La modélisation des chercheurs australiens fait le bilan de ces processus opposés, en partant de l'hypothèse que la température moyenne des eaux dans les régions coralliennes pourrait passer de 25 °C dans les années 1950 à 28,2 °C en 2100. Dans cette perspective, assurent-ils, l'effet de la température contrebalance largement l'effet de l'augmentation du taux de CO2.
"Ils apportent une note optimiste au scénario catastrophique classique", note Loïc Charpy, qui n'est cependant pas totalement convaincu. "Il s'agit d'une modélisation qui ne prend pas en compte suffisamment de paramètres biologiques", estime-t-il. Ses confrères australiens admettent l'existence de ce biais méthodologique. "Certaines preuves montrent que les différents coraux n'ont pas la même sensibilité aux changements de concentration d'aragonite et de température", reconnaissent-ils. Aussi recommandent-ils d'élargir les expérimentations à différents types de formations coralliennes.
Un autre paramètre, les cyclones, n'est pas non plus pris en compte dans leur modélisation. Il s'agit des plus gros destructeurs naturels des récifs. Or le réchauffement climatique, estiment les experts, devrait s'accompagner d'une multiplication des phénomènes extrêmes de ce type.
Hervé Morin
Une ressource pour 500 millions de personnes
Leur somptueuse beauté mise à part, les récifs coraliens constituent la source de subsistance d'un demi-milliard d'êtres humains, à qui ils fournissent leur nourriture ou attirent sur eux la manne touristique. C'est ce que rappelle le document "L'état des récifs coraliens 2004", rendu public début décembre à Washington. Ce rapport rassemble des données recueillies par 240 experts de 98 pays et souligne la vulnérabilité de ces écosystèmes. 20 % d'entre eux auraient été détruits et il n'existerait aucune perspective pour leur rétablissement. Cependant environ 40 % des 16 % des récifs sérieusement endommagés lors de l'épisode climatique El Niño-La Niña de 1997-1998 - un réchauffement des eaux qui avait entraîné leur blanchiment - ont récupéré, ou sont en voie de guérison. Un quart des récifs serait menacé de destruction imminente et un quart supplémentaire le serait à plus long terme. L'activité humaine en est la principale responsable, qu'il s'agisse de surpêche (notamment à l'explosif), de pollution, voire du réchauffement climatique, qui pourrait favoriser de forts El Niño.
• ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 19.12.04